A l'époque où l'équipe de football enflammait les supporters

La classe du cours complémentaire se rendant au stadeLe stade de la Grange-Magnin était fréquenté le jeudi après-midi par les élèves du cours complémentaire intéressés par le football, externes et pensionnaires. Sérieusement entraînés par le directeur M. Pégeot, ancien joueur de Fraisans et arbitre de la ligue de Franche-Comté et par un professeur passionné, M. Curtil, se mettront déjà en évidence certains scolaires qui, quelques années plus tard, seront les pivots de la formation locale qui fera vibrer les Orgeletains.

Et pourtant, ils n'étaient pas gâtés ces scolaires ; ils devaient acheter leur tenue sportive, leurs souliers et c'était lourd pour les petits budgets familiaux. En outre l'absence de vestiaire obligeait un strip-tease derrière les buissons du chemin de la Barbuise, et la menace d'une pluie imminente demandait une récupération rapide des vêtements et une fuite jusqu'à l'auvent de la ferme, à cinq cents mètres.

le football club orgeletain en 1937Ils étaient encore jeunes ces collégiens et ils se sont trouvés peu nombreux dans cette équipe locale de la guerre qui ne formait pas un ensemble homogène. D'ailleurs, elle ne disputait que des rencontres amicales, transportée chez l'adversaire par de lourds camions à gazo qu'il fallait pousser à la moindre rampe. Et puis juste après la guerre, d'heureuses circonstances vont permettre la constitution de l'équipe qui gravira rapidement les échelons dans la hiérarchie du football franc-comtois.

Tout d'abord, il y eut une concentration à Orgelet, pendant une longue période, de bons joueurs que la profession, le métier ou les études ont retenu dans la localité, et puis les retrouvailles des samedis soirs à l'hôtel de Paris qui scellaient des amitiés, les discussions tactiques avec tests au tableau noir dans l'atelier de forge de l'entraîneur « Trompette » ; le séjour gratuit du Sochalien Monange qui précisa les tactiques et peaufina les techniques, la fidélité des nombreux supporters si attachés à leur équipe qu'ils en devenaient chauvins...

Equipe de l'USO en promotion d'honneur de 1947 à 1954Alors se créèrent une grande équipe et dans la ville un engouement pour le football : le maire et le conseil municipal presque en entier hurlaient leurs encouragements à la formation locale qui matchait contre d'excellents clubs : RC Lons 1, FC Dole 1 et les clubs doubistes renommés.
Evidemment certains souvenirs se sont incrustés dans les mémoires, par exemple ce « quart d'heure Cinzano » que réclamaient, excités les supporters, qui avait le don de survolter les joueurs qui marquaient le but de la victoire ; et puis ce fameux refrain « l'USO ne périra pas » chanté à tue-tête aux retours victorieux.

Équipe 1ère de l'US OrgeletCertains incidents ne sont pas oubliés non plus. Telles, ces réactions violentes des spectateurs locaux devant l'erreur volontaire d'un arbitre véreux, attaché à une formation leader invaincue du championnat, mais en échec à Orgelet et s'en tirant grâce à un pénalty imaginaire. La 3ème mi-temps se passa en violentes bagarres dans les rues de la ville. Mais comment oublier les satisfactions apportées par le football, en particulier ces sensationnels dimanches de Pâques où devant une galerie de spectateurs enthousiastes l'équipe orgeletaine rivalisait de technique avec les adversaires très huppés comme Annecy ou le RC Besançon.

échange de gerbes avant la rencontre entre l'USO et l'équipe suisse de LaconexEt ce match mémorable en Suisse à Laconex, retour d'une rencontre à Orgelet au cours de laquelle les footballeurs helvètes trop bien reçus avec force vins blancs du Jura subiront une lourde défaite. Ils avaient promis de se venger et c'est le soleil et les « petits » vins du Valais qui furent leurs alliés, aussi les Orgeletains prirent une bonne leçon. Mais l'accueil fut tellement chaleureux!

Cette équipe étrenna le nouveau stade, route de Moutonne elle y disputa encore de nombreux matchs. Aujourd'hui les footballeurs de cette époque vont encourager ceux qui continuent de défendre avec brio l'honneur d'Orgelet.

ANDRÉ JEANNIN
Article paru dans Le Progrès le 18 férvier 1996