A Pâques dans les années 1930
Dans les premières décennies XXe siècle, comme de nos jours encore, Pâques drainait vers les églises une foule de fidèles très croyants et aussi de catholiques peu pratiquants, qui, pour avoir fréquenté le catéchisme dans leur jeunesse avait appris les commandements de l'église et de Dieu et se souvenait qu'il ne fallait pas surtout pas oublier de se confesser, en tête à tête à travers une grille avec le prêtre et communier à la messe dominicale. Cette catégorie de catholiques non pratiquants, respectant les consignes pascales a diminué. Peut-être parce qu'ils étaient devenus au cours des années de moins à moins patients pour attendre leur tour de se confesser. Et quand on est resté un an sans aller à confesse, il fallait du temps pour comptabiliser ses péchés.
Quant à la messe de Pâques, elle n'avait pas la magie d'une messe de minuit. Alors parfois pour ne pas commettre un péché mortel en manquant la messe de Pâques et ne pas être « en état de grâce » en oubliant la communion, on préférait respecter les consignes religieuses le dimanche des Rameaux, car la messe était moins longue et surtout parce que, enfant, on attendait avec impatience que le prêtre sorti de l'église avec ses enfants de choeur, frappât violemment de sa croix la porte pour qu'il puisse rentrer et continuer sa messe. Et puis, c'était la seule fois que l'odeur enivrante de l'encens était occultée par celle, saumâtre, des buis bénis qui orneraient pendant une année le petit crucifix placé à la tête des lits. Enfin à la sortie de cette messe des Rameaux, des garnements pouvaient chiper quelques friandises perdues aux buis.
Il existe aussi, pendant la semaine pascale des traditions un peu désuètes. Ainsi pendant quelques jours le clocher est aphone comme jadis parce que disait-on les cloches étaient parties à Rome. D'ailleurs de nombreuses cartes postales de l'époque confirmaient leur voyage : un escadron de cloches avec des ailes d'anges qui s'envolent pour Rome dans un paysage printanier car Pâques symbolise toujours cette saison avec la résurrection de la nature. Et quand les cloches revenues carillonnaient de nouveau, les enfants cherchaient autour de leur demeure les oeufs de Pâques, des vrais, cuits durs, aux coquilles peintes et d'autres parfois de petits bonbons de forme ovoïdale. Ces dons des cloches étaient appréciée car, au début du XXe siècle, les pâtisseries ne produisaient pas à foison. Et puis la recherche de ces oeufs s'apparentait à un jeu de piste existant qui aboutissait toujours à la joie de la découverte.
André Jeannin
Article paru dans Le Progrès le 14 avril 2001