Histoire de bornes
Un peu d'histoire autour d'une borne de délimitation d'un territoire forestier datant de 1614.
Le chemin cabossé bordé de framboisiers, ombragé par les grands arbres de la forêt, vestiges de l'ancien tracé de la route Orgelet-Onoz conduit à une borne en pierre que délimite le territoire forestier d'Orgelet et celui d'Onoz. Cette pierre rectangulaire de 50 cm de hauteur, 28 cm de largeur et 12 cm d'épaisseur découverte récemment fut immédiatement protégée, car elle fait partie du patrimoine historique. En effet sur ses deux faces est gravée la date de 1614 et d'un côté figure, incrusté dans la pierre un écusson portant trois épis d'orge, de l'autre un autre écusson sur lequel sont sculptés des losanges.
Et bien sûr, d'interroger l'histoire. Cette pierre limite des territoires forestiers. En 1614 la France vit sous la régence de Marie de Médicis, mais la Franche-Comté n'est pas encore française, elle fait partie de l'héritage bourguignon qui appartient à l'Espagne. Les trois épis d'orge sur la pierre sont les armoiries données à la ville d'Orgelet en 1542 par Charles Quint, quand il lui accorda le titre de ville bailliagère. Pas d'erreur donc : depuis 1614 cette partie de la forêt est sur le territoire orgeletain.
Que symbolise alors sur l'autre face les trois losanges (deux en haut, un plus bas). Ce n'est pas une armoirie, le village d'Onoz n'en a jamais obtenu. Il s'agit probablement du blason de la famille noble descendant des seigneurs de Virechatel qui possédaient un château à Onoz. A cette époque la seigneurie de Virechatel appartient aux descendants de Pierre Morel noble orgeletain, écuyer, qui l'avait achetée en 1540. Son unique arrière-petite-fille Antide épousa en 1623 César du Saix, baron d'Arnans, chef des partisans qui défendit avec sous ses ordres Lacuzon, la province, contre l'invasion française en 1639.
Or à cette époque, pour réparer son château Pierre Morel qui détestait les Chartreux envoya les gens d'Onoz dans les forêts de la Chartreuse de Vaucluse qui coupèrent tout le bois nécessaire. Cette coutume de se servir dans la forêt des autres, suscita de nombreux procès et par l'installation de bornes limites, le désir de bien situer son territoire forestier.
Il devait certainement avoir d'autres bornes. Peut-être en retrouvera-t-on dans les années prochaînes ?
André JEANNIN
Article paru dans le Progrès le 26/7/1998
Note du webmaster : depuis la parution de cette article, d'autres bornes ont depuis été découvertes sur le territoire de la commune d'Ornoz