Démographie par carte postale : le quartier de la gare de 1914 à nos jours
Cette carte postale, témoin imagé d'une époque révolue, permet de comprendre l'évolution démographique et surtout les transformations de la société d'Orgelet au cours des soixante dernières années.
Elle représente le quartier de la Gare de 1910 à 1950. Depuis le bâtiment de la poste, à droite, au premier plan, construit en 1910, un long ruban de route s'étire dans une campagne déserte, striée par des haies vives et disparaît entre deux mamelons du Mont... Au fond, à droite, à l'extrême périphérie, la tournerie Rosset, une espèce de sponsor qui employait la plupart des footballeurs orgelains, qui s'entraînaient avant la reprise du travail et à la fin de la journée sur le vaste champ devant le bâtiment, utilisé pour stade pendant les années vingt. A gauche, derrière la gare où stationnent deux trains, l'ancienne scierie Richard.
Quels joyeux souvenirs elle rappelle aux jeunes garçons qui, en cachette du propriétaire, lançaient les wagonnets sur les rails et sautaient dans leurs bennes pour un trajet à toute vitesse de quelque cinquante mètres. Ce quartier est celui qui a connu en peu de temps le plus de transformations. Il a même perdu son identité, sa gare démolie par les bulldozers en avril 1982, ses vastes champs sur lesquels s'entassent des constructions, son long ruban de route coincée entre les façades.
Le tiers de la population orgeletaine vit maintenant sur l'emplacement des champs déserts de la carte postale, avec la première ligne de maisons, à proximité de la route, protégeant celles du quartier de la Confise, des Prés-Millats qui se sont lancées à l'assaut de la colline du Mont, et celles des Buttes et des Prés-Catelins à l'abri des arbres séculaires de la promenade de l'Orme.
Maisons individuelles simples, mais coquettes avec quelques arpents de terrain, maisons résidentielles plus importantes, HLM sans laideur, hôpital Pierre-Futin imposant, gendarmerie bien conçue, foyer-logement inattendu en ce lieu, salle polyvalente immense rivalisant d'esthétique avec un groupe scolaire flambant neuf et fonctionnel s'érigent en ces lieux livrés jadis à la nature.
Orgelet avant la seconde guerre mondiale comptait 1230 habitants... Aujourd'hui 1800 environ, une progression bien moyenne en somme malgré l'éclosion de ces quartiers nouveaux qui d'ailleurs ne libèrent aucun logement dans la vieille ville. Où et comment se logeaient les Orgeletains quand, en 1851, la cité abritait 2367 habitants — chiffre record — et n'avait pas encore franchi sa ligne de remparts ?
André Jeannin
Article paru dans Le Progrès le 13 octobre 1991