Jean Alexis Dauphin DUPARCHY (1835/1907)

Jean Alexis Dauphin Duparchy

Un enfant d'ALIEZE entrepreneur audacieux de grands travaux de génie civil dans le monde entier

Maison natale de Duparchy à AlièzeC'est le 12 Mars 1835 que vint au monde, à la « Garde de Dieu», commune d'Alièze, à mi chemin entre Lons-le-Saunier et Orgelet, Jean Alexis Dauphin DUPARCHY. Son père, Jean Joseph (1797/1869), lui-même originaire d'Alièze y a épousé en 1822 Jeanne Etiennette BERTHOD qui lui a donné trois enfants : une fille morte très jeune et deux garçons. Ce sont de modestes propriétaires cultivateurs qui cependant font donner une solide instruction de base à leur second fils à l'école primaire supérieure de Nozeroy. Très vite ce dernier quitte le Jura pour Paris où il tient un emploi de secrétaire d'avocat tout en suivant à titre civil des cours d'ingénieur.
Construction du canal de SuezEn 1862 il travaille à la Compagnie des Chemins de fer du Nord et c'est de là qu'il va rejoindre en 1865 les équipes de maîtrise d'oeuvre de Ferdinand de LESSEPS à la Compagnie universelle du canal maritime de Suez. Il y fut affecté à la section de Ras-et-Ech dépendant de la division de PortSaïd. Le campement de Ras-el-Ech était situé à 15 Kms environ au sud de ce grand port, en rive ouest du futur canal, sur un flot du lac Menzaleh. Il y arriva alors que les travaux perturbés jusque là par des problèmes techniques et diplomatiques allaient enfin prendre un cours normal. La section de Ras-et-Ech, dite section de travaux du lac Menzaleh était surtout concernée par les travaux de dragage de grande envergure nécessaires pour donner au canal la section et la profondeur Drague à long couloir (Cie de Suez)désirées.

Ces travaux, depuis la résiliation en 1864 du contrat passé précédemment par la Compagnie avec l'entreprise écossaise AITON avaient été confiés à l'entreprise BOREL, LAVALLEY et Cie qui en fait eut la charge de réaliser les trois quarts des 74 millions de m3 de dragages excavés pour le creusement du canal dont 21 millions de m3 pour la seule section du lac Menzaleh.

Copie d'une note officielle à DuparchyNotre jurassien que l'on retrouve en qualité de chef de section à Ras-el-Ech (voir note en illustration) va ainsi faire son profit des techniques mises au point par les entreprises pour la réalisation - au travers de conditions difficiles - d'un chantier titanesque et innovant pour l'époque, dans un domaine s'apparentant à de grands travaux maritimes avec utilisation d'un ensemble de matériels d'une technique et d'une puissance jusqu'alors inconnues : dragues, chalands, locomotives, excavateurs, gabarres à clapets, grues à vapeur...

Mais aussi avec l'affectation d'un nombre considérable d'ingénieurs, techniciens et ouvriers, dont un fort contingent de français parmi lesquels des jurassiens que Duparchy aura incités à venir tenter l'aventure souvent d'ailleurs au péril de leur vie. Ne comptera-t-on pas, de 1865 à 1869, 937 décès parmi les européensAlexis Duparchy, en tenue de chef de bataillon, au moment de la guerre de 1870 sur l'ensemble du chantier.

C'est sans doute au cours de ces 4 années passées sur le terrain qu'il va envisager de monter lui-même sa propre entreprise. ce rpojet va être retardé quelque peu par la guerre de 1870 au cours de laquelle il se vit confier la responsabilité de chef d'un bataillon de francs-tireurs, qu'il équipera de ses deniers, vraisemblablement avec les gains de son parcours égyptien.

Il épousera en 1875 à Cérilly dans l'Allier, Marie Elisa ROUSSEL fille d'un notaire du lieu. Il ne s'en suivra aucune descendance.

Mais dès lors un tournant était pris par DUPARCHY. Sa carrière d'entrepreneur allait se développer durant une trentaine d'années qui le virent participer - toujours en groupement avec d'autres entrepreneurs - à des travaux de plus en plus prestigieux.
Tout d'abord dans le domaine ferroviaire où il s'inscrivit en bonne place parmi les grands constructeurs du 19ème siècle avec les travaux de chemin de fer

  • de Djibouti à Harrar en Éthiopie
  • de la Beïra Alto au Portugal (1881)
  • de Vole de Alcantara au Portugal (1887/1889) où il est associé à BARTISSOL et travaille en collaboration avec EIFFEL sur des ouvrages d'art.
  • de Caïs dos Soldados à Cascaïs (1887) toujours avec BARTISSOL
  • mais aussi en Russie et en Roumanie

A la suite de ces chantiers, il sera fait Comte au Portugal non sans s'être introduit à la même époque dans le cercle des grandes entreprises de travaux maritimes. En effet, associé d'abord à Jean Baptiste DAUDERNY, il remporta le concours international pour la construction du port de Leixôes (Porto 1884/1895). DAUDERNY décédé en cours de travaux y sera remplacé par BARTISSOL. Ces travaux, considérés comme les plus importants réalisés au Portugal dans le cours du 19ème siècle, furent dirigés par l'ingénieur Louis Etienne WIRIOT qui s'installera ensuite à son tour entrepreneur et travaillera en association avec DUPARCHY.

L'audace de ce dernier n'a pas de limite car dans le même temps il réalise des travaux importants et rémunérateurs dans les ports de Constantinople, Porto-Rico, Tunis-La Goulette (1885), Sousse, Sfax (1893), et Bizerte (1901) en Tunisie ainsi que Talcahuano au Chili.Les méthodes de construction des murs de quais du port de Montevideo sont fortement inspirées de celles utilisées pour la réalisation d'ouvrages semblables à Tunis, Bizerte et Suez.

Mais l'oeuvre majeure de son parcours d'entrepreneur se situe en Uruguay où, en 1901, le groupement français d'entreprises Félix ALLARD - Louis COISEAU - Abel COUVREUX - Alexis DUPARCHY - SILLARD et Louis WIRIOT - Jules DOLFUS avait signé le contrat de construction du port de Montevideo, enlevé de haute lutte devant les plus grandes entreprises anglaises, américaines et françaises de l'époque.
Il s'agissait d'un ouvrage considérable comportant :Construction du port de Montevideo

  • 11,2 millions de m3 de dragages
  • 4,3 millions de m3 de remblai de terre-pleins
  • 1 million de m3 d'enrochements naturels et artificiels

Les techniques et matériels utilisés pour la construction des quais s'inspiraient beaucoup des solutions adoptées tant au canal de Suez que dans les travaux portuaires mentionnés ci-dessus. Alexis DUPARCHY n'aura pas vu cet ouvrage achevé car il s'était éteint le 2 Octobre 1907 à Savigny-sur-Orge dans la région parisienne, où il possédait une magnifique demeure : le château de Grandvaux dans un parc de 90 hectares.

Parc du château de Savigny-sur-Orge

Château de Savigny-sur-Orge

Construction du tunnel de LoetschbergQuelques temps avant sa disparition il devait encore en 1906, au sein du groupement ARCADA, s'investir dans un ouvrage dont la réalisation posa d'énormes problèmes, à savoir le creusement du tunnel du Loetschberg dans les Alpes bernoises qui ne devait se terminer qu'après son décès.
La carrière particulièrement brillante de cet entrepreneur audacieux lui aura permis d'amasser une fortune conséquente dont, au-delà de ce qu'il destinait à sa famille, il légua une part significative à différents bénéficiaires. Parmi ceux-ci, l'Académie Française pour « distribuer chaque année des prix d'argent aux plus nombreuses familles qui seraient malheureuses et cela dans le Jura, la Seine et Oise et le Sème arrondissement de Paris», où encore «pour la distribution chaque année de bourses à l'École de Chalon ou tout autre école dans le genre de Chalon » pour les mêmes attributaires.Décorations La Ville de Savigny-sur-Orge quant à elle se vit léguer un patrimoine immobilier important, moyennant quelques obligations, qui montrent l'étendue et la justesse de jugement à long terme du bienfaiteur.

De nombreuses décorations étrangères lui furent décernées, notamment par la Turquie, l'Ethiopie, la Roumanie, l'Espagne et le Portugal.

La croix de Chevalier de la Légion d'Honneur lui fut attribuée le 21 Mars 1885, le jurassien Jules GREVY étant alors Président de la République Française.

G. &A. BIDARD

Bibliographie et crédit photo

  • Cie universelle du canal maritime de Suez
  • Henri DUPARCHY
  • Archives du port de Montevideo